2004 La Cuisine

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2004, « La Cuisine » (Trophée Poitou-Charentes)  à Rouillé;

La cuisine nous place au cœur battant du théâtre. Tout y est : Intrigues de cour et champ de bataille si l’on veut. Indispensable métaphore du monde, débarrassée de tout oripeau. La cuisine me guide dans une voie assez rare, celle d’un théâtre véritablement populaire, qui parle avec un réalisme troublant, des gens ordinaires.
Il restera toujours j’espère, se sentant probablement quelque peu « dinosaures, » des  passionnés du « Théâtre militants à la Culture Populaire ». Dans ma démarche depuis les années 80 jusqu’à aujourd’hui, j’en croise un certain nombre, rencontres souvent très brèves et furtives mais, animées d’une passion commune : l’intérêt et le respect du travail avec les amateurs.

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Je pense à tous ceux qui participaient au Théâtre de Verdure deL’Isle Jourdain, au Théâtre du Lavoir, à la Compagnie des Halles de Rouillé avec Annie-France Bercier, avec Jean Marie Levesques au théâtre de Châtellerault, avec Dominique Rudnick à Romagne, avec Yves Jallais à Chauvigny, avec Chantal Cochin à Journet et aussi, à beaucoup d’autres que j’ai découverts de 2000 à 2007 dans mon travail en itinérance avec le Centre Dramatique en Région Poitou-Charentes.

Pour ceux que j’ai cités précédemment, une personne commune relie notre démarche, Michel Geslin qui est« Conseiller Technique et Pédagogique auprès du Ministère de la Jeunesse et des Sports  et de l’Éducation Populaire ». Il accompagne de ses conseils nos créations et sensibilise les gens à la pratique du théâtre. Dans le cadre de sa mission avec son savoir être et faire, il fait des interventions plus ou moins longues sur certains de nos projets. Il a un rôle de conseil très précieux, de force de proposition et de direction d’acteur.

effervescence

Il m’a convaincu de la nécessité de la rigueur, pas de complaisance pour se faire plaisir, mais toujours penser en premier au spectateur, pas de concessions, ne jamais se satisfaire, travailler… Je partage aussi, en totalité ces propos de Michel Geslin « Il ne faut surtout pas opposer les deux pratiques de théâtre, les amateurs et les professionnels. Il y a de grandes différences de jeu, mais notre rôle est avant tout de créer et d’avoir de bonnes surprises. La relation entre le directeur d’acteur et les acteurs, c’est le conseil, la proposition de sa propre vision. C’est en quelque sorte un pari sur ce qu’il croit que le public va ressentir ».

Image numérisée23Annie-France Bercier qui dirige alors la Compagnie des Halles de Rouillé, me sollicite. Elle me demande de leur rechercher et proposer des textes, afin qu’ils en choisissent un que je puisse leur mettre en scène.

Pendant quelques mois, je cherche la pièce de théâtre qui succédera aux œuvres que cette compagnie a représentées les années précédentes : « En r’Venant d’ l’Expo », « Le Chasseur Français », « Vague à l’Homme »…

Parmi mes propositions, l’équipe de Rouillé retient « la Cuisine » de Arnold Wesker.

J’ai accumulé, sélectionné, au cours des années dans ma « tête-bibliothèque », un ensemble d’œuvres théâtrales aimées . Elles dorment et attendent le moment propice et opportun, d’être révélées au public. C’est ainsi, que depuis 1990, j’ai entre autres, en réserve cette pièce. Je l’avais envisagée pour le Café-Théâtre du Lac à L’Isle Jourdain. Mon histoire et celle de ce  lieu, en ont décidé autrement…

serviceL’auteur de « La Cuisine », Arnold Wesker, est  né à Londres en 1932. Il est l’auteur de trente pièces de théâtre et de plusieurs volumes de prose, dont un premier volume d’autobiographie publié en 1994 : outre « La Cuisine »  parue en français pour la première fois en 1967 et créée à Paris en 1976 par Ariane Mnouchkine, sa trilogie « Soupe de Poulet à l’orge », « Racine », « Je vous

parle de Jérusalem » a été publiée et représentée en français, ainsi que, entre-autres pièces, « Des frites, des frites, des frites, » « Les quatre

saisons, » « Lettres d’amour sur papier bleu, » « Qui a peur de Betty Lemon ?.

 Cette cuisine symbolise la société et le fonctionnement de l’individu. Elle révèle très brutalement comment la vie moderne peut agir sur les êtres et les bousculer en détruisant leurs rêves et en leur retirant de la douceur dans l’existence.

hans coureu

Le propos de la cuisine est simple : il s’agit d’une journée dans la cuisine d’un restaurant à grand débit, ses hauts et ses bas, ses moments de calme et d’affolement, sa routine et ses crises.  Son personnel hétéroclite est fait de solitaires, d’oiseaux de passage, d’idéalistes, de vieux routiers et d’amoureux…

 

C’est le monde du travail à la chaîne, dans cette cuisine populaire où on prépare 1500 repas par jour. Cuisiniers, serveurs, serveuses, balayeurs, un patron paternaliste font leur métier et de temps en temps arrachent de leur travail forcené quelques minutes de rêve, quelques minutes de folies furieuses ou une scène de ménage…L’enfer… La pièce compte pas moins de 23 personnages.

lydie Que peut-il se passer dans les cuisines d’un restaurant brasserie de 1500 couverts ? C’est un univers inconnu pour moi, il m’intéresse et me questionne.  J’imagine bien à la lecture, les tensions, l’ambiance et j’ai envie de découvrir cela de visu. C’est ainsi que je me fais « inviter »  dans la cuisine d’une brasserie rue Carnot à Poitiers pendant le coup de feu de midi. Puis, ne doutant de rien, je vais m’installer quelques heures dans la célèbre brasserie « La Coupole » à Paris. Là, avec la complicité sympathique du personnel, j’assiste captivé, au service. Pressions, rythmes, hiérarchies, ces deux restaurants ont des points communs qui valident le réalisme de l’oeuvre de A. Wesker.

rodolpheCette démarche me fait mateur, regardeur des cuisines de restaurants, c’est exactement ce que j’ambitionne faire partager au public. Avec acuité, j’imagine les dispositifs d’accueil du public et de jeux des comédiens. Je fais des croquis, réalise des esquisses, elles deviennent de plus en plus précises jusqu’à la réalisation d’une  maquette.  Elle explicite pendant les premiers mois de répétitions, les entrées, sorties et déplacements des comédiens. Les spectateur sont installés de part et d’autre de la scène (une cuisine) dans un dispositif bifrontal. Les cuisiniers ainsi, font mijoter leurs plats, les serveuses déambulent avec des piles d’assiettes sous le nez du public…

sophieDes comédiens venus du Théâtre du Lavoir, du Conservatoire, de

Poitiers et d’ailleurs se joignent à la Compagnie des Halles et composent ainsi un groupe d’hommes et de femmes de tous âges prêts à en découdre.

 

Mon premier travail consiste à adapter l’ensemble du texte de Wesker à cette nouvelle équipe. Il me faut transposer, alterner certains rôles du masculin au  féminin, tenir compte de leur personnalité, de deux personnages en créer un seul, changer des prénoms, trouver les ambiances sonores, modifier et adapter et tout réécrire et enfin me retrouver dans ce texte très particulier composé essentiellement de commandes de plats multiples.

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Ce moment est décisif et important. Il m’oblige à visualiser l’ensemble de la mise en scène et c’est là que souvent je prends les premières décisions et des orientations déterminantes. Je suis rôdé à un tel exercice, je me qualifie de bidouilleur de mots et d’histoires, gonflé et audacieux, j’aime prendre une œuvre à bras le corps et la retranscrire.

 

J’installe dans cette maquette les fourneaux, les plans de travail les dessertes, les étagères, les victuailles, les récipients, et le matériel de cuisine. Je situe les portes entrées et de sorties, de services, de salle à manger et de laverie.

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Je peux ainsi visionner dans l’espace, la circulation de ces ouvriers et ouvrières, vrai ballet contemporain, rythmé, dansé, ce texte écrit comme une partition, au tempo millimétré, est véritablement de l’horlogerie, chaque réplique est un rouage qui a besoin de l’autre pour faire avancer le mécanisme.

Très vite nous allons acquérir du matériel de cuisson et de desserte dans une collectivité. Nous rassemblons une montagne d’accessoires de cuisine, vaisselles, casseroles, instruments, couteaux, friteuses etc…  Nous allons à Montluçon auprès « Des Fédérés » chercher les  gradins. Nous mettons en commande l’ossature de la cuisine auprès des Ets SARL Hay qui seront exécutés fidèlement aux plans.

croquis 2Dés les premières répétitions, il est nécessaire d’équiper et de figurer provisoirement la cuisine avec tous ses ustensiles et accessoires. Cela représente un temps important de transport, d’installation et de démontage à chaque répétition, l’union faisant la force, le grand nombre de comédiens se rôde vite à cet exercice.

Dans la logique du l’histoire, je situe cette cuisine dans les années 60, les règlements d’hygiène n’étaient pas regardants sur les entrées et sorties du propre et du sale et là où les serveuses commandaient directement aux cuisiniers leurs plats et venaient les chercher.

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 Le monde pour Shakespeare est une scène de théâtre, ici, au propre comme au figuré, c’est la cuisine, qui est une scène de théâtre, le va-et-vient des personnes fait qu’on n’a jamais le temps de se comprendre, et les amitiés, les amours, les conflits sont des feux de paille, aussitôt oubliés. Cette cuisine, en cours de service, sera saisie par la folie : un lieu de précipitation, de querelles mesquines, de plaintes aigres, d’orgueil mal placé, de prétention…

La qualité des plats au Tivoli a moins d’importance que la rapidité du service.

maquetteLe travail des cuisiniers est derrière leurs fourneaux. Là, ils épluchent, pèlent, découpent hachent pilent, tournent, brassent, les aliments envahissent les plateaux, les poubelles se remplissent…  Il n’y a pas de mets, mais les gestes agissent avec leur absence, tels que les spectateurs très vite voient les morceaux de poulets, les œufs se casser… Les femme qui s’occupent des desserts, des fromages et du café, on les voit de temps à autre. Les marmitons ceux qui sont à la plonge, mettent les couverts , ils n’apparaissent pas. Nous n’en voyons qu’un, qui remplace les assiettes sous le comptoir du service, qui recouvre de sciure le sol gras et qui balaie.

décor accessoiresLes serveuses s’occupent toute la matinée dans la salle à manger avant de s’installer pour déjeuner. Pendant le service, elles font des aller-retour perpétuels entre la cuisine et la salle à manger ; elles commandent des plats aux cuisiniers qui les servent. Ces serveuses sont d’une efficacité totale. Elles font un mouvement circulaire autour de la cuisine, crient leurs commandes en direction du poste où elles doivent être servies, se déplacent rapidement, et transportent un nombre impressionnant de plats  à la fois.

La pièce s’ouvre au petit matin et se referme tard dans la nuit. La cuisine nous ouvre les portes de cet univers (microcosme) où se bousculent dans un rythme effréné nos vingt trois comédiens affairés .

Image numérisée23-1C’est aussi le monde du travail à la chaîne, dans cette cuisine populaire. Après le coup de feu, Mario, un tout jeune cuisinier soupire « C’est pas un endroit pour un être humain, ce bordel. C’est un trou juste bon pour crever … »

Cuisiniers, serveuses balayeurs, patron paternaliste, font leur métier et de temps en temps arrachent de leur travail forcené quelques minutes de rêve, quelques minutes de folies furieuses ou une scène de ménage … L’enfer.

Comment la vie moderne peut agir sur les êtres et les bousculer en détruisant leurs rêves et en leur retirant de la douceur dans l’existence ?

Arnold Wesker a vécu réellement cette expérience de la cuisine il dit ne pas savoir inventer, mais regarder autour de lui et observer la vie. Je ne peux imaginer la mise en scène autrement que la plus réaliste possible, usant de la sensibilité et personnalité de chacun des protagonistes, c’est mon choix.  Cette pièce pourrait aussi être réalisée en une parodie pantomime délirante et déjantée à la Jérôme Deschamps, tous les ingrédients du surréalisme y sont présents…

Image numérisée25-1Un heureux hasard vient s’inviter dans cette création. Depuis deux ans, je travaille avec l’équipe du Centre Dramatique Poitou-Charentes du « Printemps Chapiteau ». Je côtoie, sympathise et collabore avec les comédiens qui composent cette aventure.  Ces comédiens viennent de multitudes aventures prestigieuses vécues au TNS, à la Comédie Française, à Aubervillier, et au Théâtre du Soleil. Gérard Hardy est un des membres fondateurs du Théâtre du Soleil.  Il a joué plus d’une cinquantaine de spectacles sous la direction des plus grands metteurs en scène, dans les années 60, il a fait partie de la distribution de la « Cuisine », mise en scène par Ariane Mnouchkine. Gérard est entièrement investi dans la démarche « Printemps Chapiteau ». Il participe dans chaque étape du petit matin, au soir au montage du chapiteau avec le public local. Modeste et généreux, il est de toutes les rencontres avec les habitants, il est d’un contact françoisdirect sincère et amical. Très à l’écoute et respectueux du travail des amateurs, il est curieux de voir notre chantier en chemin de « La Cuisine ». On attend et redoute son regard. Notre répétition l’intéresse, il trouve nos personnages bien distribués, le jeu précis et réaliste lui plait. Il adhère à notre démarche, retrousse véritablement ses manches pour nous forger à tout le travail gestuel qu’il nous faut interpréter avec dextérité et naturel : gestes du cuisinier qui prépare ses légumes, du boucher qui découpe, du poissonnier qui écaille, du légumier qui épluche …. Tout cela confectionné avec des légumes et des aliments qui n’existent pas. Il nous place dans l’exigence du rythme, m’aide de son influence pour faire accepter au comédiens, la rigueur et précision du geste et la nécessité du travail continu du texte, comme ces « Italiennes » avec un métronome nous faisant débiter un texte infernal, qui doit s’accélérer jusqu’à l’implosion. cathy 3Il revient plusieurs fois suivre et conforter notre avancée. Nous sommes conscients d’avoir la chance de profiter du plus beau parrainage que l’on peut imaginer.

C’est ainsi, que dans ma tournée en itinérance de 1999 à 2006, je bénéficie de belles rencontres auprès de comédiens qui généreusement savent partager et aiment guider ce milieu qui leur est proche, les amateurs. C’était là, la pleine réalisation et mission du projet de Claire Lasne-Darcueil « Le Printemps Chapiteau .»

C’est un immense plaisir de fouiller ainsi dans mes souvenirs, ils sont à la fois lointains et si proches, il en est de même de ma relation avec chacun des protagonistes de l’épopée.

Vous, lecteurs, s’il est fastidieux de voir ce défilé de personnages que vous n’avez peut-être même pas rencontrés et encore moins connus, lorsque le rideau  de scène descend sur ces visages que vous venez  d’applaudir, ne vous demandez-vous pas ce  qu’ils étaient et ce qu’ils sont devenus ?

Pour moi, 10 années sont passées !

sophieSophie c’est Huguette, une serveuse vive, active, instinctive, elle joue des hanches pour se faire de la place. Comme son personnage, nature spontanée, généreuse, un sourire qui damnerait un saint… pour peut-être se damner elle-même quelques années plus tard dans « Le p’tit bal », où lorsque je la marie dans « l’Opéra du Gueux .» Puis, elle va vivre ailleurs bien d’autres engagements généreux…  la vraie vie lui fait rencontrer un charmant comédien du « p’tit bal » ! et la relève de son sourire pointe dans la petite frimousse de leur Romane qui déjà apprend à jouer de sa séduction…

 

lydie 2Lydie, c’est Mado, une serveuse  apparemment sympa, sauf lorsqu’elle veut faire tabasser son mari et récupérer le fric pour ses enfants. Elle Laisse apparaître de plus en plus sa fatigue et nervosité, jusqu’à s’écrouler, catastrophe, elle est de nouveau enceinte. Fragile et forte dans cette vie de chien, je lui en propose une autre, pleine de fraîcheur dans « le p’tit bal .» Ce n’est pas que du théâtre, mais c’est probablement ( !) au théâtre qu’elle  trouvera encore et pour de vrai cette fois, un très gentil comédien (Le Cercle de Craie Caucasien) avec qui elle aura beaucoup d’enfants.

 

 

Isabelle et Jennifer sont Denise, deux serveuses pour un même rôle .

Isabelle comme toutes les autres filles, porte la tenue des serveuse de l’époque : jupe bleu-marine, chemisier et tablier blanc, et il va de soi, dans cette brasserie, et dans l’époque, elle porte des chaussures à talons. Pendant les longues heures des répétitions,

isabelleil lui faut s’entraîner à porter ces talons hauts, d’un pas souvent accéléré avec les mains toujours chargées de plats, d’assiettes ou de verres… C’est un chalenge et une réelle épreuve à surmonter, ça change des baskets et c’est une habitude à prendre avec souvent le mal aux pieds qui arrive insidieusement. (… !) Mon rôle de metteur en scène est de tourner le dos à cette problématique ! mais par contre, je redoutais une chute, une glissade  et ses conséquences ! Le sol de cette cuisine, pour l’esthétique décor, était un tapis de danse (glissant !) Quelques glissades se sont produites, mais heureusement sans conséquences. Je n’imaginais pas qu’Isabelle quelques heures avant une répétition, jouant un match de badminton se fracturerait la cheville, à environ 1 mois des représentations. Nous sommes tristes pour Isabelle, et pensons combien elle doit être déçue, voilà comment, Jennifer élève du Conservatoire de Poitiers, reprend et attrape ce rôle au vol et le travaille avec sérieux et talent.

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Denise, est possessive, jalouse, soupçonneuse, nerveuse, instinctive. Tout lui tape sur les nerfs. « S’il n’est pas rentré, je fous le camp ! « Elle danse le rock, est impulsive, exigeante, raciste, traite sans ménagement les étrangers, bouscule, pas sociable, pas très sympathique généralement avec les hommes et à peu près tout «  Cette merde de cuisine- Ce putain de menu de merde… » Isabelle, notre calme et douce Isabelle, dans ce contre emploi, que ne lui fais-je pas faire ? Elle s’en débrouille avec une humeur inhabituelle et si naturelle qu’elle nous interpelle et amuse. Quelques mois plus tard, lors de la reprise de ce spectacle, elle retrouvera son rôle.  Jennifer avec un tempérament de feu, déménage fort dans cette cuisine.  Son rôle m’inspire la suite de son personnage, élégante, allumeuse, provocante en croqueuse d’hommes dans « le p’tit bal. » Elle nous éclate…  Je l’emmène aussi dans un rôle totalement retenu dans « Les voies insolites de Notre-Dame La Grande .» 

jakoJacqueline, c’est Pauline la pâtissière. Son homme l’a quittée, « un con ». Elle, contrairement aux autres de la cuisine, est très calme et a moins tendance à paniquer. Son jeu est juste,  précis il me sert à lui écrire, comme une suite de personnage dans « le p’tit bal » une Pauline heureuse, chantant de sa belle voix.  Elle chante et joue encore.

 

annie france 2Annie-France et Delphine se partagent le rôle de Raymonde  au service du buffet froid. Elle vit seule, fume, boit un petit coup, bonne poire, impulsive, elle a le cœur sur la main. Elle aime jouer la provocation. Raymonde est émotive, mais revendique sa liberté, fait des gaffes. Annie France en convalescence partage ce rôle avec Delphine. J’ai aimé cet exercice : faire travailler en parallèle deux comédiennes très différentes voir opposées, donnant dans un même rôle le meilleur d’elles-mêmes. Annie-France est engagée bec et ongles au service du théâtre.

delphineDans les années qui suivent Delphine interprète avec talent une héroïne dans « le p’tit bal » et « l’Opéra du Gueux », digne d’un roman de Zola.

 

 

cathyCathy c’est Liliane la nouvelle serveuse. Elle a travaillé pour un restaurant chic, par cela, elle donne une apparence fière et prétentieuse… Cathy dans ce rôle joue avec succulence à être naïve, fragile, critique, crédule, au bord de la crise de nerfs, rebelle, maladroite et tout et tout… Houa ! … Quel bonheur cette rencontre.

Pendant cet épisode, je projette, médite et écris mon prochain spectacle, « Le p’tit bal perdu .» Cathy et bien d’autres caractères des personnages de la cuisine m’inspirent. Dans cette fiction, j’imagine lever le voile intime des protagonistes de cette cuisine dans un p’tit bal du dimanche, lieux où ils s’évaderaient : comment oublier et chercher à remplir sa vie de l’autre, de l’idéal et de saveur ?

Cathy jouera Md Pitchum dans « l’Opéra du Gueux » un personnage haut en couleur et beaucoup d’autres rôles depuis ailleurs.

hélèneHélène est une Anne  douce sympathique, facile à vivre, elle est attachée aux desserts fromages et cafés. Il semble que son personnage soit uniquement là pour rappeler qu’il est aussi possible de rester calme dans cet enfer ! Un personnage presque fait sur mesure !

 

eliseElise est une Geneviève serveuse, très active elle donne raison à tout le monde et n’a pas froid aux yeux, elle provoque, a de la répartie, est sympathique…  elle chante comme le rossignol qu’elle est…

 

 

madoPauline est Simone la serveuse, elle donne l’apparence d’être cool et essaie de flirter avec Hans. Charmante, elle veut profiter de la vie, un peu mauvaise langue avec les copines, elle ne garde pas ses secrets, c’est une personne, comme son personnage attachante.

 

moniqueFrédérique interprète Monique, une serveuse mariée et amante de Peter. Elle assure l’accueil dans la salle. Elle a un comportement très ambigu avec Peter, par moments, elle le provoque exagérément allant de l’insulte à des scènes osées de séduction. Quel beau rôle !

 

youssefRodolphe c’est Youssef une marmiton sage et intelligent. Il se destine à des choses meilleures, il rêve…  Il rêve de survivre comme le « Pioupiou » de « Ah Dieu que la guerre est jolie », de retrouver Groucha dans « Le Cercle Craie Caucasien, il rêve de ne plus être seul dans « le Ptit Bal », il est le gueux de son « Opéra », il est l’inconnu de « Prophète sans Dieu » et Rodolphe continue de  jouer de mettre en scène et il chante …

Image numérisée25Olivier F est Alfredo, le rôtisseur, il est axé sur son boulot, parle peu, avec un humour pince sans rire, chantonne en travaillant, fait du troc, aime la bière et fume, il travaille pour le fric. Il est très convaincant dans ce rôle de cuisinier.

 

 

philippeDavid, c’est le jeune Philippe qui fait les potages, omelettes… Il aime le bruit des fours, il aime le foot… provocateur et filou il nous imprègne du charme arrogant de sa jeunesse.

 

 

medhiMedhi est Samir aux grillades, steaks et viandes. Il est ami de tous jusqu’au bout du service, et puis il a tendance à craquer, à paniquer et à crier après tout le monde. C’est une belle personnalité qui joue sa partition théâtrale avec autant de justesse qu’avec son violon.

 

olivier 2Olivier N et Jean-Noël  se partagent le rôle de Hans à la friture un jeune Allemand,  sensible, timide, qui drague Simone et chante avec sa guitare.

 

 

jean noelJean Noël reprend son rôle pour la reprise, puis continue le jeu théâtral dans « Le p’tit bal. »

 

 

 

françois 2François est Mario aux poissons, sardines grillées, saumons, soles, pommes de terre, frites… déboussolé par la folle bousculade c’est pire que tout ce qu’il a pu connaître jusqu’à maintenant, il ne va pas tenir le coup et il finit son rôle comme dans la pièce, lessivé au propre comme au figuré. François, comédien fou dans « Le Théâtre Ambulant Chopalovitch », est au chœur de toutes les aventures : « Le P’tit bal », « Prophète sans Dieu », « les Voies Insolites de Notre Dame », « l’Opéra du Gueux », il continue aujourd’hui à aller d’un rôle à l’autre.

samuel bougrierSamuel c’est José  aux légumes chauds. Marié à Denise, il a un comportement jovial, intégré, supérieur à ses compères. Il est à la fin de la journée un peu ivre, mais enjoué et spontané, il rend très sympathique ce personnage.

 

 

jean yvesJean-Yves est Peter l’Allemand exubérant agressif, joyeux, bon, naturel, il est amoureux de Monique et vit sur les nerfs, en amant pathétique et jaloux,. Maîtriser la fougue de ce comédien extrême, sur le fil tendu d’un jeu troublé, tourmenté, déchiré  peut-être encore plus de l’intérieur que ce qu’il donnait à voir, c’est un souvenir intensif et heureux.

 

richardRichard, c’est Franck le boucher, le chef adjoint, il est fort en gueule grivois, il boit systématiquement toute la journée, finit par être saoul et flirte avec les serveuses… Belle découverte que le gars Richard et pour ajouter encore à cet hurluberlu, dans l’élan, je le construis immonde dans le p’tit bal et brigand sans morale dans L’Opéra du Gueux. Depuis, chemin faisant, je le vois parsemer des jeux théâtraux, drôle, inventif… ici ou là.

nicolasNicolas, c’est le Chef, il aimerait travailler ailleurs, moins on lui parle de ce métier et plus il est content. Il adresse rarement la parole aux autres, à l’exception de son numéro deux Franck. Il est tout le contraire de son rôle,  perfectionniste, toujours en doute et attachant.

 

enversEnver est le Clochard Kukul, un clochard que l’on aimerait héberger.

 

 

 

pogetti 1Francis est Peretti le patron. Il manifeste toujours une expression de grande tristesse, mais il n’est pas vraiment triste, il s’apitoie sur lui-même. Francis est une de ces personnes qu’il suffit d’avoir rencontrée une fois  pour y être définitivement attaché.

Les indissociables à cette aventure sont : Bertrand C et Pierre M deux efficaces rencontres et les précieuses Hélène M qui pertinemment nous costume et Christelle B qui nous maquille.

peter echelleJ’ai aimé travailler les portraits de ces femmes et de ces hommes, personnages rattrapés par leurs rêves, miroirs de nos propres luttes contre les épreuves d’une existence aigre-douce ? Chacun d’eux ne cherche-t-il pas la recette idéale pour une vie comblée, tout en s’agitant comiquement à refuser une vie dénuée de saveurs ?

 

salutsCe spectacle a surpris le public par la prouesse de jeux des acteurs. Les séances étaient combles, nous avons programmé une reprise qui a eu le même succès. Le milieu professionnel bien représenté dans le public, nous a témoigné un grand intérêt pour ce travail et je sais par les échos venus d’ici ou là, que ce spectacle s’est imprégné dans les mémoires .

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(Trophée Poitou-Charentes)

 

Le théâtre filmé, captation d’une soirée en directe de « La Cuisine » à Rouillé .

Ce montage vidéo est un beau cadeau qui a été offert à chaque artiste de « LA CUISINE » à la compagnie des Halles. C’est en quelque sorte une récompense méritée en prolongement naturel de leur travail, le magnifiant sur un autre support …

Merci pour ce beau travail à : Julie et Pierre à la caméra et, Patrick Ballu pour le montage.

 

Photos : Michel Geslin – Jean-Jacques Godfroid – Michel Mourasse